Ce séminaire réunira les intervenants suivants: Beatrice
Mariolle, Laboratoire IPRAU, Ecole d’architecture Paris-Belleville ; Claire
Petetin, Architecte, Laboratoire LéaV, Ecole Nationale Supérieure
d’architecture de Versailles ; Jean Francois Dingjian, Designer, Ensci/les
Ateliers ; Justina Swat, Wikihouse ; Alain Renk (UFO/agence
d’architecture R+P) : projets Villes sans limites ; Ekim Tan,
Fondatrice de Play the City, TU Delft ; Nicolas Magret, artiste ;
Rand Hindi, Fondateur de Snips; Arnaud Banos, ancien directeur de l’Institut
des Systèmes complexes de Paris, urbaniste, directeur de recherche CNRS.
1. Objectifs
de l’enseignement
- familiariser les étudiants à une démarche
réflexive
- développer une pensée réticulaire
- construire des propositions originales de
recherche en design
2. Problématique
La révolution numérique a durablement impacté la production architecturale et
le design. Les nouvelles technologies ont permis l’hybridation des approches et
des styles, généré des pratiques inédites d’architecture interactive et modifié
en profondeur l’activité conceptuelle des architectes et designers.
Parallèlement, la montée en puissance de l’innovation ouverte a favorisé des
démarches collaboratives d’intervention sur la ville qui questionnent le sens
et les finalités des projets urbains.
Le spectre des transformations est large et la « ville numérique »
cristallise, à l’évidence, de nombreux discours et écoles de pensées. En
partant des théories développées par des designers, architectes, sociologues et
philosophes, ce séminaire a pour objectif de tirer au clair certaines prises de
position afin de mieux évaluer les promesses mais aussi les limites de la
culture numérique dans le champ du design et de l’architecture. Que sont devenues les visions de l’Architecture
Radicale qui, face à la crise de la modernité rationaliste, dissolvaient la
ville, l’architecture et le monde des objets dans les réseaux de communication
et de marchandises ? Les concepts plus récents de ville générique et de
Junkspaces de Rem Koolhaas sont-ils suffisants pour analyser les derniers
développements de la ville contemporaine ? Que deviennent les imaginaires
d’une open-city face aux problématiques de cloisonnement et de remaillage
urbain (gated communities, edge city, urban sprawl) ? De quelles manières
les pratiques d’architecture open-source réinterrogent-elles les
modalités de l’implication citoyenne ? Un travail rétrospectif sur les
conceptions de la ville depuis la modernité jusqu’aux constructions critiques
de l’architecture radicale et du postmodernisme nous permettra de clarifier les
visions de la ville afin de mieux appréhender les mutations contemporaines sur
le devenir urbain.
Dans un second temps, nous verrons de quelles manières les outils de
conception paramétrique affectent les processus de conception du projet
architectural et urbain et marquent l’évolution vers une architecture de plus
en plus modulable, éphémère et flexible. Dans ce contexte, la convergence qui
s’amorce entre l’impression 3D, la robotique et les sciences du vivant sera
l’occasion d’ interroger les nouveaux contours et usages de la ville du futur.
Quelles nouvelles approches de la matérialité laissent augurer les
« living cities » du futur ? De
quelles manières cette nouvelle condition urbaine transforme-t-elle notre
relation cognitive et sensible ? La ville du futur est-elle celle des
opportunités inimaginables ?
3. Déroulement
Ce séminaire est conjoint à
l’ENSCI/Les Ateliers et à l’Ecole des Beaux-Arts de Bordeaux.
Il s’organise autour de 4
sessions d’une journée sur un semestre et est crédité d’ECTS (30 H).
- Session
1 : Retour sur la modernité
- Session
2 : De l’architecture radicale à la ville générique
- Session
3 : Présentation de projets
-
Session 4 : « Living
cities » : la ville entre informatique et technologies du vivant
Les journées sont construites
autour de 3 temps forts :
- Exposés
d’étudiants et mise en débat (3h)
- Invitation d’un intervenant avec présentation de projets, interview et discussion (2h)
- Intervention d’un designer de l’Ensci sur la problématique de la journée et ouverture à d’autres questionnements (2h)
- Invitation d’un intervenant avec présentation de projets, interview et discussion (2h)
- Intervention d’un designer de l’Ensci sur la problématique de la journée et ouverture à d’autres questionnements (2h)
4. Détails des sessions
a. Retour sur la modernité
a. Retour sur la modernité
Avec la révolution numérique, les attributs hypermodernes de la
ville riment dorénavant avec complexité, flux, informations et réseaux.
Dans un contexte de ville diffuse dominée par l’instabilité, les
phénomènes de polycentralité et de superposition des espaces et des
temporalités, comment les démarches de conception urbaine évoluent-elles ?
Les principes d’une architecture moderne comme intention et détermination
sont-ils encore opératoires ou l’architecture devient-elle précaire, liquide et
éphémère? Qu’advient-il des attributs constitutifs de la ville européenne
(centralité, histoire, contexte, identité..) et des modèles
universalisants de planification urbaine chers à Gropius ou à Le Corbusier ? Comment
la généralisation des outils numériques impacte-t-elle l’activité conceptuelle
des architectes et vient « retravailler » certains principes modernes
comme « forme suit fonction » (Sullivan)?
Enfin, lorsqu’on parle de culture
numérique, on y associe également l’émergence d’une architecture spectacle
centrée sur l’objet et le produit. Prenant le contre-pied de ce phénomène, des nouvelles
pratiques du "faire-ensemble" voient le jour (Francis Kéré ;
Wang Shu) et plaident pour une "architecture du milieu" en instaurant
un dialogue entre nouvelles technologies et spécificités culturelles. Que nous
disent ces pratiques collaboratives sur la tension entre
universalité/singularité et sur les vertus de l’hybridation, de l’échange et de
la transmission ?
Propositions d'exposés :
1. Qu’en est-il de «
la forme suit fonction » ? La valeur du contexte et de la forme à l’heure de l’hyperville.
2. La ville : un mythe moderne ? De Gropius au Corbusier.
3. Les contre-exemples de
l’architecture-produit : les initiatives de Francis Kéré et Wang Shu.
b. De l’architecture radicale à la ville générique
La standardisation des espaces, la reproduction indifférenciée des
mêmes expériences en tout lieu sont souvent évoquées comme le trait principal
des métropoles contemporaines. L’ascenseur, la climatisation, le faux plafond
ont façonné un espace urbain hors contexte qui, à l’heure actuelle, est fortement sujet à caution.
Aujourd’hui, l’intégration des nouvelles technologies remet en question l’idée
même de ville générique pour aller vers des formes singulières, des
constructions hétérogènes, et la multiplication des signes.
Souvent portées par un engagement politique, les pratiques open
source se multiplient avec pour ambition de remettre la conception urbaine dans
les mains de l’usager. Peut-on construire une filiation entre ces pratiques
collaboratives et les utopies des années 60 liées à l’autoplanification et à la
créativité sociale ?.
Par ailleurs, à l’heure ou les réseaux numériques sont un outil de
connaissance de la ville, doit-on considérer que le cyberespace dédouble et
enrichit les espaces urbains ou assiste-t-on à un découplage entre la
physicalité figée de la ville d’une part, et la dématérialisation des flux
informationnels, d’autre part. Quelle capacité réelle avons-nous à
« habiter » l’infrastructure et les réseaux de communication ?
Quel type de nouveau rapport au cadre bâti, les pratiques interactives en
architecture construisent-elles ? Vers quelle appropriation de la ville
nous conduit le cyberespace ? Quels sont les outils et modèles d’action
des « designer urbain » dans les processus de création ?
Propositions d'exposés :
1.
L’open city : l’urbanisme collaboratif en question.
2. Superstudio et Archizoom : des utopies
perdues ?
3. Les nouveaux champs d’intervention des architectes et
designer urbain.
c. « Living cities » : la ville entre
informatique et technologies du vivant
La ville se fabrique aujourd’hui à
partir de programmes et de projections où les données tiennent une place
essentielle.
En tant qu’outils de management des
services urbains (gestion des consommations énergétiques; déplacements ;
recyclage des déchets ; services de géolocalisation..), les données soulèvent
des espoirs dans une régulation plus efficace et plus écologique du métabolisme
urbain. A quel modèle de ville nous renvoie cette approche
néo-cybernétique?. Quels imaginaires se développent à partir d’une ville pilotée
comme un système ?.
Par ailleurs, le big data est en train
de renouveler les méthodes de planification urbaine et de conception
architecturale. En intervenant en amont de la conception, les données
permettent des échelles de complexité inédites et enrichissent les niveaux de
lecture du territoire. En architecture, les outils paramétriques font
apparaître une multitude d’usages pour davantage de modularité et de
flexibilité selon les besoins et stimuli du monde extérieur. De quelle manière
la conception paramétrique transforme-t-elle les formes et les innovations
d’usage dans la ville ? Quel type d’expériences fait-elle émerger en
intégrant des paramètres environnementaux (climat, lumière, pollution..) ?
Enfin, la maîtrise des technologies du
vivant reconfigure les matérialités urbaines. Le vivant s’invite dans la fabrication de l’architecture
avec des matériaux et des systèmes toujours plus interactifs. Nous assistons à
une nouvelle appréhension des formes qui ne relèvent plus exclusivement d’une
composition esthétique mais qui incorporent des nanobiotechnologies et les
dernières recherches sur les matériaux émergents. Quelles atmosphères urbaines font-elles
émerger ? Dans le contexte d’une porosité accrue entre un dehors et un dedans,
comment l’individu et la place du corps se réinventent-ils ?
Propositions d'exposés
1. Data et militarisation de l’espace public
2. Prouesses et limites de l’architecture
paramétrique
3. Technologies du vivant et nouveaux
imaginaires pour la ville.
5. Bibliographie
1er
session : Retour sur la modernité
-
Choay, Francoise, L’urbanisme, utopies et réalités, le Seuil, 1965
- Gropius Walter, Architecture et
société, Editions Du Linteau, 1995
-
Sullivan, Louis, Forms follows function, Editions B2, 2011
-
Branzi, Andrea, No-stop City, 1967, édition Hyx, 2006
- Branzi, Andrea, Nouvelles de la métropole froide : design et
seconde modernité, Paris, Editions du Centre Pompidou, 1992
- Rowe
Colin, Koetter Fred, Collage City, Centre Georges Pompidou, 1993
-
Réenchanter le monde : l’architecture et la ville face aux grandes
transitions, catalogue d’exposition sous la direction de Marie-hélène Contal,
Collection Manifesto, 2014
2
session : De l’architecture radicale à la ville générique
- Koolhaas, Rem,
Junkspace : repenser radicalement l’espace urbain, Edition Payot et
Rivages, 2011
- Architectures non standard,
Catalogue d’exposition du Centre Pompidou, sous la direction de Frédéric
Migayrou, Editions du Centre Pompidou, 2003
-
Branzi, Andrea, No-stop City, 1967, édition Hyx, 2006
- Branzi, Andrea, Nouvelles de la métropole froide : design et
seconde modernité, Paris, Editions du Centre Pompidou, 1992
- Picon, Antoine, Culture numérique et
architecture - Une Introduction, Birkhausen, 2010
- Sennett Richard, « La ville ouverte »
dans L’esprit des villes, sous la direction de Thierry Paquot, ed. Infolio,
2014
- Violeau, Jean-Louis, L’utopie et la ville après
la crise, épisodiquement, Sens&Tonka, 2013
4
session : Living cities : la ville entre informatique et technologies
du vivant
- Picon Antoine, Smart
Cities : Théorie et critique d'un idéal auto-réalisateur, Editions B2, 2013
- Graham Stephen, La militarisation de l’espace
urbain : la ville sous contrôle, La découverte, 2012
- Banham, Reyner, L’architecture de l’environnement bien
tempéré, Restitutions, 2011
- Rahm Philippe, Architecture météorologique,
Archibooks, Paris, 2009
- Interactive Cities, N°6 dans Anomalie digital arts,
Dir. Edition : Valérie Châtelet
- Andrasek, Alisa, Biothing, collection Hyx, 2009